Introduction : le droit, colonne vertébrale du commerce
Reprendre un commerce, ce n’est pas seulement acheter un fonds et ouvrir les portes : c’est aussi respecter un cadre légal strict. Normes de sécurité, règles fiscales, affichages obligatoires, licences… La moindre omission peut entraîner des amendes, voire une fermeture administrative.
D’après la DGCCRF, près de 30 % des contrôles dans le commerce de détail révèlent au moins une non-conformité, souvent liée à un manque d’information du repreneur.
1. Le bail commercial : le socle juridique
Le bail est le contrat qui vous lie au propriétaire du local.
- Durée classique : 9 ans, avec résiliation possible tous les 3 ans par le locataire.
- Clauses sensibles : révision du loyer, répartition des charges, interdiction de certaines activités.
- Destination des locaux : attention à ce que l’activité prévue corresponde au bail (exemple : impossible de transformer une boutique de vêtements en restaurant sans avenant).
👉 Conseil pratique : toujours vérifier le bail avec un avocat spécialisé avant de signer la reprise.
2. Licences et autorisations spécifiques
Certains commerces nécessitent une licence obligatoire.
- Débit de boissons : licence III (alcools fermentés), licence IV (alcools forts).
- Restauration : petite licence restaurant ou grande licence restaurant.
- Pharmacie, optique, tabac, presse : monopoles réglementés.
- Transport et alimentation : agréments sanitaires (DDPP), déclaration en mairie pour certains métiers.
Témoignage – Karim, repreneur d’un restaurant à Toulouse :
« Je pensais que la licence restaurant suffisait pour vendre du vin à emporter. Faux : il faut une licence à emporter. J’ai perdu 3 mois de chiffre d’affaires. »
3. Normes de sécurité et d’accessibilité
Tout établissement recevant du public (ERP) doit être conforme.
- Sécurité incendie : extincteurs, plan d’évacuation, éclairage de secours, conformité électrique.
- Accessibilité handicapés : rampes, signalétique, largeur des portes. Depuis 2015, les commerces doivent être accessibles ou avoir déposé un agenda d’accessibilité programmée (Ad’AP).
- Hygiène alimentaire (restaurants, boulangeries, épiceries) : règles HACCP, traçabilité des produits, plan de nettoyage, température des chambres froides.
👉 Chiffre clé : en 2024, près de 45 % des sanctions DGCCRF dans le secteur alimentaire concernaient le non-respect des normes d’hygiène.
4. Obligations fiscales et sociales
Le commerçant est soumis à plusieurs obligations déclaratives :
- Immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS).
- Tenue de comptabilité (simplifiée ou complète selon régime).
- TVA : régime réel simplifié ou normal.
- Impôts : IS pour les sociétés, IR pour les entreprises individuelles (sauf option).
- Cotisations sociales : Urssaf, caisse de retraite complémentaire.
5. Affichages obligatoires dans un commerce
La loi impose un certain nombre d’affichages visibles pour les clients :
- Horaires d’ouverture.
- Prix TTC des produits (et tarifs détaillés pour certaines professions : coiffeurs, garagistes, restaurateurs).
- Moyens de paiement acceptés (et conditions, ex : CB à partir de 10 €).
- Interdiction de fumer, consommer de l’alcool aux mineurs.
- Coordonnées du médiateur de la consommation.
- Pour les salariés : affichages relatifs au droit du travail (congés, inspection du travail, numéros d’urgence).
Exemple concret : en 2023, la DGCCRF a infligé 500 000 € d’amendes pour non-respect de l’affichage des prix dans la restauration rapide.
6. Protection des données et numérique
Même un petit commerce est concerné par le RGPD s’il collecte des données (fichier clients, programme fidélité, newsletter).
- Consentement obligatoire.
- Droit d’accès et de suppression des données.
- Sécurisation des fichiers (pas de base clients non protégée sur un PC portable).
👉 Conseil pratique : déclarer un DPO (délégué à la protection des données) n’est pas obligatoire pour un petit commerce, mais tenir un registre des traitements est recommandé.
7. Assurances obligatoires ou fortement conseillées
- Responsabilité civile professionnelle (RC Pro) : couvre les dommages causés aux clients.
- Multirisque professionnelle : locaux, matériel, stock, perte d’exploitation.
- Assurance décennale : obligatoire pour certains métiers artisanaux (ex : bâtiment, électricité).
8. Les erreurs à éviter
- Penser que « le cédant était en règle, donc je le suis aussi ». Chaque reprise impose une vérification personnelle.
- Négliger les affichages obligatoires : un simple contrôle peut coûter cher.
- Oublier de vérifier les normes accessibilité/ERP : les travaux de mise en conformité peuvent atteindre 10 à 50 000 € pour un commerce moyen.
Encadré « Chiffres clés »
- 30 % des contrôles DGCCRF dans le commerce détectent au moins une infraction.
- Les amendes pour non-respect des obligations d’affichage vont de 450 à 1 500 € par infraction.
- Le coût moyen d’une mise aux normes accessibilité pour un commerce de 50 m² est estimé entre 12 000 et 20 000 € (source : Ministère du Logement).
Conclusion : anticiper pour éviter les sanctions
Respecter les obligations légales n’est pas une option, mais une condition de survie. Un commerce non conforme risque non seulement une amende, mais aussi une perte de confiance des clients.
La meilleure pratique : effectuer un audit réglementaire complet avant de signer, accompagné d’un avocat ou d’un organisme consulaire.
En résumé : le droit est votre allié, pas un obstacle. Un commerçant conforme est un commerçant serein.